Sortie de la nouvelle « P’tit Pédé ». Un texte qui, s’il reflète une condition difficile et une violence récurrente encore aujourd’hui, se veut empli d’espoir… Parce qu’il ne faut jamais baisser les bras. Que l’on a 15 ans ou 79 ans. Laissez-vous tenter par cette histoire émouvante ou les premiers émois de nos héros, vont les marquer si fort, qu’ils vont toujours garder espoir de se revoir un jour…
Après la désolation, il y a la reconstruction.
À tous ces jeunes rejetés parce qu’ils sont différents. Parce qu’ils n’attendent qu’un peu d’amour.
Vous êtes des survivants, des résilients, celles et ceux qui demain, pourront montrer qu’aimer un garçon lorsqu’on
est un garçon n’est pas une faiblesse, mais une force.
Lorsqu’on agrippa la chevelure d’Arnaud avec véhémence et qu’on le lança contre le mur, ce dernier ne réalisa pas ce qui était en train de lui arriver. « Sale petite fiote ! Y m’semblait bien que ça ne tournait pas rond chez toi ! Je l’ai toujours dit ! » l’insulta Fernand en le ruant de coups.
Simon alla allumer la minuterie et fut horrifié par le regard de ce père, injecté de sang et habité d’une inimitié indescriptible. Des éclairs semblaient sortir de ses yeux comme s’il était possédé par le malin.
Il prit peur et se sauva en appelant à l’aide, mais personne ne l’entendit, tandis qu’Arnaud accusait les coups, sans ne plus même les ressentir. La tête à l’envers, il contemplait cette silhouette enchanteresse s’éloigner, ses jambes, ce corps qu’il désirait tant, ses mains, cet amour et toutes les espérances qu’ils s’étaient destinés, s’enfuir alors que l’avenir leur promettait la lune.
Il ravala ses larmes, encaissa un dernier coup de pied dans l’estomac lui coupant le souffle, avant de tenter de s’échapper des griffes de ce fou furieux.
Le père l’empoigna par le col de sa veste et lui cogna la tête sur le sol à deux reprises « Sale petit pédé ! Je vais te montrer ce qu’on devrait leur faire à tous ! » s’emporta-t-il, en frappant encore, mais Arnaud saisit son pied, le renversa de ses dernières forces en lui tordant la cheville, hurla toute sa détresse en un cri déchirant la nuit et demandant « Pourquoi ? ».
Il se rua sur le corps de son paternel et le saisit à la gorge de ses doigts puissants. S’il s’était laissé emporter par la colère, Arnaud lui aurait brisé les cervicales d’une seule pression, mais la lueur de la moto de son amoureux mit en exergue son ombre sur le mur ; le géant qu’il voyait serrant la gorge de ce diable n’était pas lui, assurément, et Arnaud ne voyait personne, à ce moment-là, capable de le lui faire prendre conscience. Cette image serait à jamais inscrite dans sa mémoire, dans sa chair, dans son âme. Il entendit le bruit du moteur s’éloigner, les replongeant dans la pénombre et un étrange silence sembla s’abattre sur l’immeuble tout
entier.
« Pourquoi ? » réitéra-t-il d’une voix étranglée par des sanglots.
Des larmes se bousculèrent dans ses yeux pour s’écraser sur la figure burinée de cet homme à qui il aurait tout donné, même sa vie ; pour qui il aurait fait n’importe quoi, même trahir ses amis, mais c’était bien trop l’honorer. Fernand ne le méritait pas. Tout son être le lui fit éprouver en relâchant la pression de ses doigts. Ses moindres vaisseaux, ses plus petites particules confortaient ce qu’il ressentait envers cet homme. Ce père, qui s’il le traita toute son existence comme un monstre, pouvait se targuer d’en avoir fabriqué un, songea-t-il, en réalisant son geste criminel et la haine ressentie durant ce bref instant ou tout aurait pu basculer.
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